Les sobriquets d'autrefois
entre Rance et Couesnon

par Marcel JUHEL
 

*JPT* - Avertissement - Si les sobriquets désignant des individus n'étaient généralement par bien méchants (*) et acceptés le plus souvent avec bonne humeur, ce n'était pas le cas de ceux qui ciblaient les habitants des communes voisines et bien souvent rivales. Le temps ayant passé, ces sobriquets (ou signoris) font désormais partie de notre petite histoire. Nous espérons donc que ce texte n'éveillera aucune rancœur chez le lecteur.

A Landudal on n'allume pas
De cierges à la grand'messe :
Le miel, nous le léchons,
La cire nous la vendons,
A l'auberge le tout nous portons.

Vous trouvez que ce n'est pas très gentil pour les habitants de Landudal...! D'ailleurs ces vers me font penser à la chanson de Jacques BREL dans laquelle il dit : « chez ces gens-là , Monsieur, on ne pense pas.....on prie ».

Mais nos ancêtres n'étaient pas plus gentils qu'ils n'étaient tristes... ou sous la coupe du clergé... ou tempérants... ou abstinents. D'ailleurs nous sommes à leur image. Ils prenaient simplement un peu plus de temps pour observer les travers des autres. Comme on dit encore au Québec. ils adoraient <se tirer la pipe>.

Voulez-vous vous laisser "embarquer" pour que tous ensembles nous essayions de retrouver les sobriquets d'antan ? Ils étaient abondamment utilisés par nos ancêtres du Clos-Poulet (nous déborderons un peu... !), qu'ils soient marins ou cultivateurs.

Les sobriquets et surnoms des villageois sont aussi vieux que les hommes et se sont maintenus au cours des siècles. Ces moqueries témoignent des us et coutumes en milieu populaire et notamment du parler savoureux et imagé des gens simples de nos communes.

Le phénomène s'observe sur toute la France. A l'exception de sobriquets particulièrement marrants donnés à des individus... mon idée est surtout que nous nous consacrions aux sobriquets dont étaient affublés l'ensemble des habitants d'un village, afin de recueillir ces informations qui ne subsistent plus que dans la mémoire ensommeillée de quelques personnes âgées.

EXEMPLES HORS BRETAGNE

L'Acadie, des gens d'cheu nous... ou peu s'en faut :
Les gens de Petit de Grat s'appellent les <<mangeurs d'arêtes>>.
Exercice : Quel est le "sobritchais" de Yvon SAMSON qui habite Petit de Grat ?
Réponse : Catou, mangeur d'arêtes.  

Nos marins quand ils n'étaient pas en mer, ne restaient pas à la maison car leur femme leur disait qu'ils les gênaient dans leur travail. Ils se retrouvaient alors en bandes de copains pour discuter de tout ce qui passait à leur portée. Ils se donnaient des surnoms entre eux, puis leur esprit railleur s'appliquait à donner des surnoms hauts en couleurs à tout ce qui bougeait autour d'eux.
Les femmes n'étaient pas en reste pour l'esprit moqueur. Je me souviens de ma tante, personne fort modeste de la rue "frette" à la Ville-es-Nonais. Elle avait une gravure représentant Jeanne d'Arc à la tête de son lit. et elle se tordait les boyaux en évoquant cette voisine qui lui avait demandé....si c'était sa belle-soeur. Un peu plus... et je serais venu au monde par immaculée conception !
Pour les marins, je n'ai rien sur Cancale, pour le moment, mais des exemples sur Concarneau : "Cadic gros cul" ; "Couilloukézec" ; "Trente-six brasses de gueule" ; "Grande loche ". etc....
*JPT* Pour Cancale : Plus de 300 sobriquets dans le n° 2 des "Cahiers" (*) 

Les paysans en révolte portaient fièrement leurs sobriquets, restés gravés dans l’Histoire. Souvenons-nous :
---Des "Bonnets rouges" de LE BALP et de la Révolution du papier timbré
---Des "Pieds nus " des paysans de l'Avranchin révoltés en 1640.
Les "sobritchais" des paysans faisaient souvent allusion aux opérations agricoles. On vit fleurir dans le Clos-Poulet... les "Cotissous" = casseurs de mottes, du verbe cotir (casser, écraser). Ma mère parlait de cotir un insecte. Ce verbe a donné : coti = fatigué, harassé
<<Il a travâlloe toute la journée, le v'la net coti>>
J'ai retrouvé le nom de cette fleur (mauve) que l'on peut faire claquer entre deux mains : c'est la "digitale" que l'on appelle justement "cotias" en gallo.
Les petites gardiennes de vaches de distrayaient comme elles pouvaient pendant les longues heures d'attente et... en gardaient un bon souvenir. La preuve en est que c'est ma mère qui m'a parlé des "cotias" et que ce mot est resté enfoui au fond de ma mémoire.

===Toujours sous la rubrique des sobriquets, mais dans la marine cette fois :

---Le capitaine était appelé "le vieux "
---Le mécanicien : "le bouchon gras"
---Le cuisinier : "l'empoisonneur de chrétien".
---Dans la "Royale", le capitaine d'armes était surnommé "le bidel", du patronyme d'un dompteur de cirque du début du XX ème s. Étant donné son rôle à bord du navire ou à terre ce surnom était tout à fait adapté ! Croyez-en le fils d'un ancien "bidel". *JPT* Sans oublier le "fayot" désignant les marins de la Royale (pardon papa).
....et bien d'autres encore.

Ces "sobritchais" imagés, frappés à l'emporte-pièce, avaient généralement pour origine un bout d'histoire, un travers populaire, une anecdote locale, un usage disparu. C'est ainsi que je n'ai jamais pu déterminer pourquoi on appelait les habitants de Pleugueneuc les "Chouans roux"... alors que Pleugueneuc a toujours été un village rouge (même de nos jours...). Il est vrai qu'il y avait 4 châteaux, ceci expliquant cela.... !
<<Le peuple, essentiellement porté à la malice, y a mis l'empreinte de son esprit>> écrit Charles LECOMTE en 1906 (Essai sur le blason populaire de l'Arrondissement de Saint-Malo).
Christian JOUQUAND, a qui nous emprunterons quelques-unes une de ses découvertes, écrit dans "Si Pleugueneuc et ses environs m'étaient contés..."

<<Le souvenir s'éteint, la cueillette des informations est devenue fort difficile. Le brocard ne subsiste plus et s'efface définitivement avec la disparition des coutumes et moeurs originales qui caractérisèrent autrefois chacune de nos régions, chacune de nos contrées, chacune de nos bourgades >>

Avant qu'il ne soit trop tard. essayons de combler ces lacunes.

CANCALE

Deux sobriquets :

===Les "berdots". Donné également aux habitants de HIREL.
Je n'ai pas trouvé la signification. J'ose avancer une hypothèse... qui ne me vaudra pas que des amis...pourrait venir du gallo "béraod", bête, idiot, imbécile. S'cusez... si c'est pas ça...!
*JPT*  Je préfère l'acception du langage cancalais : berdaou = jeune enfant, qui s'applique pourtant bien mal aux cancalais.   

===Les "mangeoux d'orbiches "
C'est à dire des mangeurs de roussettes, ce petit squale que l'on peut pêcher le long de nos côtes (j'en ai pêché...) Il est très beau dans l'eau (couleur orange vif)... mais sa peau est aussi rugueuse que la toile émeri. Cette peau était autrefois utilisée sous formes de lanières ou pour nettoyer le cuir. La chair de ce poisson n'est pas très prisée... elle devait l'être à l'époque par les Cancalais ! Ce devait être avant les parcs à huîtres.

SAINT-PÈRE-MARC-EN POULET

Les "aconis"

Théodore CHALMEL donne l'explication suivante :
<<Si l'on attribue à ce mot le sens de gens laborieux et tranquille, il dépeint assez bien le caractère distinctif de la population, mais il n'en est pas ainsi : ce terme grec aurait plutôt un sens péjoratif.>>
Très diplomate notre Théodore. Pas la peine d'aller chercher le grec.....! En gallo "aconis" veut dire : abrutis par le travail, le bruit.... C'était jadis. plus maintenant !

*JPT* Toujours en Cancalais acôni = sourd

LA GOUESNIÈRE

Les " batonniers". Les habitants de la commune passaient pour des gens querelleurs, procéduriés.
Je ne savais pas ça de mes ancêtres qui ont habité cent ans dans ce village.

*JPT*  ou aussi les "Chouans"

CHATEAUNEUF ( Châtiaouneu)

Les "teignoux", expression qui désigne une population crasseuse. Je ne suis pas sur de cette interprétation car "crasseux" se dirait plutôt "craçous".
On pourrait aussi penser à l'expression "teigneux" qui est comme une teigne, qui s'accroche en dépit de tout.

MINIAC-MORVAN (en gallo : Miniâ )

Trois sobriquets à eux tous seuls...

1/---"Ventres d'bleu na " (blé noir) par opposition aux "Ventres d'paumelle" (orge), sobriquet donné aux gens de Pleudihen. Là aussi j'ai une hésitation. il me semble me souvenir que "paumelle" a une autre signification ( peut-être liée au cidre...ce qui s'imposerait à Pleudihen !). Qui voudrait bien donner son avis ?
2/---Les "bousinous" que je traduirais par "pisseurs", " bousine" désignant la vessie.
3/---Les "Miniâ-gratins ", qui sont de la gratte c'est à dire radins.

LA FRESNAIS (La Frênâ )

1/---Les "pattes vasouses" = les pieds dans la vase.
2/---Les "nombrils jaunes ". ils avaient le teint jaune

SAINT-BENOIT-DES-ONDES

Les "Bénédictins " …dont Saint-Benoit est le patron.

SAINT-COULOMB

Les "Ducs ", les fiers.

SAINT-MÉLOIR (Saint-M'laï )

Les "Glorieux ", gens imbus de leur personne, orgueilleux, prétentieux, vaniteux. On dit aussi "Lorieûs ".

LA VILLE-ES-NONAIS (La Ville-es-Nonâ)

Les "Tocsons dévirés "
Tocsons = farfelus et dévirés = à l'envers, terme de marine : retourner en sens contraire: dévirer le cabestan.

SAINT-SULIAC (Saint-Suliâ )

Les "Margattes», nom gallo de la seiche.
Pour ces deux dernières communes... on sent l'influence de la Rance et des "pelletas".

PLERGUER

Les "braies gâres". ceux qui portent des culottes bicolores.
Gâre signifie bicolore. <<Une vache gâre.>>
Gâre naer = blanc et noir
Gâre rouje = blanc et rouge.
.....une coquetterie sans doute !

BONNEMAIN

1/---Les "haut hannés". Les "hannes" ce sont les culottes. <<Boutonne don ta hanne !>> ; <<Tu perds tes hannes >>. Haner veut aussi dire habiller.
2/---Les "téniers ". Semble venir de "tanière" (en ancien français : taisnière = gîte de bête sauvage, servant de repaire aux animaux de toutes espèces. "Se téner" c'est se cacher en se tapissant. La région était très boisée.
Est-ce un souvenir des chouans ? Bien des prêtres non-jureurs, pendant la Révolution, ont du "se téner" pour éviter la prison du Mont Saint-Michel. Ils le faisaient souvent chez l'habitant. Plus de 80 % des prêtres du 35 furent des non-jureurs, le taux le plus élevé de France.
3/---Les "tanguiers". La tangue est une espèce de sable gris mêlé de limon stimulant pour les récoltes. Les agriculteurs de Bonnemain allaient chercher cette tangue dans les grèves du Mont Saint-Michel.
On voit combien ces sobriquets peuvent nous informer sur l'histoire d'un village. et sur la perception que pouvaient en avoir les villages voisins.

SAINT-GUINOUX

Les "Coucous".
Certains disent que beaucoup d'habitants venus de Normandie occupaient, comme le coucou, un nid tout fait. Peut-être. mais avec les "coucous", si on élimine un "o" et un "u". on entre dans un domaine qui est à l'origine de nombreux sobriquets.
Les habitants de Saint-Guinoux étaient aussi appelés les "voloux" (voleurs). et aussi les "bulots" du nom d'un coquillage qui servait à "bouetter"....quand on pêchait la morue à la ligne sur les bans de Terre-Neuve du temps de la marine à voile.

Revenons à nos "coucous"..... ils étaient très nombreux à lancer leur appel dans les arbres. je doute fort qu'il en soit encore ainsi de nos jours !

        À SAINT-LÉONARD(qui fait actuellement partie d'Épiniac) on était plus explicite:
        <<<À Saint-Léonard, sur quinze mariages, quatorze coucous et un cornard>>

        Le mariage voilà un beau sujet !

        À CANCALEon posait la question suivante :
        ---<<Quelle différence y-a-t-il entre cent huîtres et cent femmes ? ?>>
        ---Eh, ben. Dans cent huîtres vous risquez de trouver la perle rare >>
        Les femmes, pour ne pas être en reste, disaient que pendant le trajet de la maison au bourg, pour le mariage, les violons et la vielle insinuaient :
        <<Viens, viens, malheureuse viens,
        Voilà le bourreau qui t'emmène ;
        Viens, viens, malheureuse, viens,
        Voilà le bourreau qui te tient >>

MEILLAC( Meuillâ)

Les "Houssus". Houssu = mal peigné. Ils portaient les cheveux très longs et on disait :<<Aund y'a d' la paille... y'a du grain !>>....allusion fine aux "habitants" problématiques de ces luxuriantes toisons.

"Houssé" veut aussi dire habillé : <<Comme il ét mal houssé !>>

DOL-de-BRETAGNE

Les "fouéroux".

Certains disent que c'est à cause des fièvres dues au marais de Dol. Je n'y crois pas car dans ce cas on dirait plutôt "fièvroux". Je vois plutôt ce sobriquet dériver de "fouère" (foire). Dol était un centre de foires et d'assemblées. Pourrait laisser supposer que les habitants aimaient faire... la fouère..... Ne pas confondre avec "fouéreux" dans "un pet fouéreux". c'est à dire peu orthodoxe....je ne vais pas vous faire un dessin !
Comme disait une vieille dame de Hirel, qui. , pendant l'occupation, visait les Allemands :<<Ce qu'on ne peut pas leur dire. on leur fait sentir..!>>
Je reviens sur Dol-de-Bretagne. la vieille métropole mérite bien qu'on s'y attarde.
"Fièvroux" ...ou "Fouéroux" ??? Ce bon Bertrand ROBIDOU ("Histoire et panorama d'un beau pays") consulté. semble donner raison aux deux:

Il écrit d'abord : <<Silence aux détracteurs de la vieille métropole ! Non, ce n'est plus la marécageuse cité habitée par une population au teint chlorotique, au tempérament débile et fiévreux....>>
Puis : <<Mais il est un jour dans la semaine où tous les Dolois sont marchands, où chaque famille a son magasin, son hôtel, son étalage ou sa tente en pleine rue. Vous avez déjà nommé le pittoresque marché du samedi, vanté dès le XIème s. par le géographe ÉDRISI et troublé au XVIIIème s. par les gentilshommes des environs, qui s'y rassemblaient pour enlever les femmes, et coupaient les nez des maris opposés à ces galants exploits. Ces faits se sont passés sous l'épiscopat de Robert CUPIF. >>

Alors "fièvroux" ou "fouéroux" ?

MONT-DOL (JPT)

Les "ventres jaunes"

CHERRUEIX

Si les habitants de Saint-Suliac sont des "Margattes". ceux de CHERRUEIX sont des "Ventres de Margattes" en fait les os de seiches, dont sont friands certains oiseaux et que l'on trouvait (trouve ?) beaucoup sur les grèves de la commune.

*JPT* Mais aussi : les "chiens" ???

BAGUER-MORVAN(Badyé)

Les "Chouans".
Baguer-Morvan fut appelée "Coblenz" selon M.Toussaint-Gautier (Dol et ses alentours- 1854) car Coblence fut le lieu de ralliement des émigrés qui y formèrent l'armée de Condé.

LANRIGAN

Les "Chie-en-hannes et les pattes naires ".
Ils avaient tout pour plaire. du moins selon leurs détracteurs....ou les envieux

Les galettes de blé-noir (sarrasin) (Krampouz en breton), qu'il ne faut pas confondre avec les crêpes (froment), sont à l'origine de plusieurs sobriquets :

SAINT-SYMPHORIEN

Les"Hec-à-galette". La "hec" étant le râteau qui sert à étendre la pâte sur le galetier. Dans les inventaires après décès, dans la longue (et pauvre ) liste de ce que possédait le défunt. il y avait toujours un galetier...et ses accessoires......la vache avec son petit nom et souvent le cochon.
Pierre CHENARD, un sympathique habitant de Pleugueneuc, aujourd'hui disparu et qui n'avait pas son pareil pour décrire les mœurs de sa commune, a écrit :
<<A cette époque, il y avait beaucoup de petits ménages qui n’avaient qu’une vache. Aucun rapport avec les vaches des stabulations d’aujourd’hui qui sont maigres avec des pis énormes, les cornes sciées, un numéro attaché à l’oreille, les pauvres…elles n’ont pas de nom et lorsqu’elles bousent, ce n’est qu’un infect liquide noir, conséquence des produits chimiques qu’elles avalent. Elles ne vivent que cinq ou six ans. Les vaches solitaires de ce temps-là, elles étaient chouchoutées, elles vivaient vingt ans, elles étaient toutes bien grasses, elles avaient le poil soyeux, l’œil vif, les cornes en guidon de course, et elles avaient toutes un nom : la Grise, la Coquette, la Pâquerette, la Capucine, la Trompette, la Jolie, etc…, et elles bousaient, elles faisaient des cataplasmes de vingt centimètres de circonférence sur quinze de hauteur, de la bouse verte et compacte : en somme des bouses confortables et présentables !....Ces bouses on les appelait de la "beurzizine".>>

Dans nos campagnes. on ne se contentait pas de trouver des "sobritchés" aux voisins...on savait aussi conter et au besoin rire de soi et de ses travers. C'est ce qu'il ne faut pas oublier pour ne pas considérer à tort ces sobriquets comme de la simple médisance.

LA BOUSSAC

Les "Chie galettes". ce qui veux évidemment dire que les habitants ne se contentaient pas de manger la galette le vendredi. Il est vrai que cette galette peut se manger avec toutes sortes de choses pour changer le menu : avec des "gourganes" dans la soupe, en petits morceaux dans du lait "ribot" ou "lait de beurre" (ribot veut dire beurre en breton). etc.

SAINT-JACUT-DE-LA-MER

Pour les femmes, pas de difficulté, elles étaient appelées "les seneuses" car pour pêcher la crevette et le bouquet sur les fonds sableux, elles utilisaient une sorte de filet appelé la "senne".
Pour les hommes c'était une autre histoire car ils étaient appelés les "haouaouaw". sobriquet bien étrange...si on élimine tout de suite l'explication par les chiens....même les chiens de mer ! !
1/---On s'accorde à donner l'explication suivante : il existe un gros rocher à Saint-Jacut connu sous le nom de Saint-Haouaou. Quand les marins passaient devant, ils se découvraient et disaient : <<Saint Haouaouaw. donnez-nous des maqueriaoux (maquereaux) >>.
Cette invocation leur a valu ce sobriquet. mais le fameux saint, on ne le trouve nulle part ....et surtout pas dans notre calendrier ! Heureusement, me direz-vous car après "Fet-Nat" cela aurait fait un bien curieux prénom....

2/---Je ne peux éviter de faire un rapprochement avec un autre pays de marins : Miniac-Morvan . Depuis les temps les plus reculés jusqu'au milieu du XXème s., à Miniac-Morvan, le premier lundi de décembre était organisée une foire des terres-neuvas appelée << foère-es-maraouw >>.
C'est une appellation pour nos pelletas que je ne connaissais pas.
Étrange ce rapprochement. non ? Avez-vous une explication ?

*JPT* A Cancale le terme de "maraou" désignait les habitants du marais de Dol. Par extension c'était plus généralement tous les paysans qu'on enrolait pour la pêche.

ÉPINIAC ( Eupinia )

Les "ventres de rochettes"
Le noyau de la cerise est appelé "rochette", alors que la cerise est appelée "badiaou".
Les mauvaises langues disaient que les habitants d'Épiniac. étaient si gloutons...qu'ils avalaient les noyaux.
Ceci me rappelle une histoire de "badiaou"... toujours racontée par Pierre CHENARD.

      EN MONTANT DANS L’BAÏDIEU

      A l’opposé du halage, il y avait d’énormes merisiers. Ces merisiers sauvages se trouvaient , à cette époque, en plein rapport…et c’était cela qui tentait les mômes ! Le grand avait bien essayé de grimper dans l’un d’eux, mais le tronc était trop gros. Alors il eut une autre idée : en poussant au derrière du petit, il réussirait à le faire attraper une basse branche chargées de <<baïdines>>. Le jeune attrapa ainsi la branche à deux mètres du sol, puis il réussit même à s’y accrocher des deux pieds et à s’éloigner du tronc. Mais lorsqu’une main lâcha pour saisir une poignée de cerises, tout céda et il tomba sur le dos dans une de ces bouses de vache dont je viens de parler. Sans elle, il se serait fait très mal ! Si le choc fut amorti, ce ne fut toutefois pas sans conséquences, la bouse était entrée par sa culotte courte, et si la mère n’avait pas autant jacassé, elle l’aurait sûrement entendu crier. Le grand frère, voyant le tableau, ne savait pas par quel bout prendre le petit frangin, alors approchant du bord de l’eau et prenant son souffle, il lança avec un superbe accent de Saint-Domineuc :
      --- " Moman ! ".
      ---Deka, mon gars ? "répondit la vieille.
      Puis le môme reprit son souffle :
      ---" En montant dans l’badiëu, p’tit freur Joseu est châ l’tiu dans la merde…de..! ".
      On imagine l’hilarité que cette sortie, lancée à plein tube dans le silence du matin, déclencha parmi les pêcheurs sur le quai en face !
      ---" Oh ! " mon Dieu " dit la bonne femme. " Quieu grand malheur! " ajouta-t’elle aussitôt en changeant de ton. ---" Tu pouvais pas y feur attention, c’est d’ta faoute, maoudit p’tit con ! Amène lé ma, amène leu ".
      ---" Mais y n’peut pas marcheu, il a la beurzizine païcée par la bouse ", répondit l’aîné, ce qui déclencha une nouvelle rafale de rires parmi les pêcheurs.
      ---" Écoute-les rire " disait la mère, "ces fainéants-là, sraient-y pas mieux au boulot…Allez au boulot ! au boulot… ".
      Avec bien des difficultés, le jeune en faisant de tous petits pas, l’aîné réussit à le traîner jusqu’auprès de la laverie. Là, le grand reçu de la mère une vigoureuse paire de " calottes " qui l’envoya retrouver sa vache ! …et elle eut bien du mal à démerder le petit qu’elle garda, penaud, auprès d’elle…
      Mais, du quai en face, où étaient les pêcheurs, toutes les deux minutes, une voix s’élevait pour dire :
      ---" Moman ! ".
      ---" Deka mon gars ? " répondait un autre pêcheur, puis tous en chœur entonnaient :
      ---" En montant dans l’baïdieu, p’tit freur Joseu est châ l’tiu dans la merde…de… ! ".
      Quand mon père revint de la pêche, il n’avait qu’une dizaine de gardons, mais le reste de la journée, faisant seul les demandes et les réponses, on l’entendait s’exclamer :
      ---" Moman ! ". " Deka mon gars ? ". " En montant dans l’badïeu, p’tit freur Joseu… ".

LANHÉLIN :

Les "Picotous», du fait des carrières de granit et des fameux tailleurs de pierres, les "Picoteux".
Quant aux médisants, qui se piquaient de poésie auprès des bourgeois du coin, ils disaient :
<< Les filles de Lanhélin
     sont souvent volages.
     Leurs yeux, bleus comme le lin,
     les font croire sages. >>
....pour ma part, j'ai tendance à me méfier de ce genre de faux-jetons. qui crie que la mariée est trop belle .....tout en tirant la langue !

MESSAC (Msa)

Les "Pahous». Les lourdauds, les maladroits.

VIEUX-VIEL ( Vieuvet ou Vieuva)

Les " hourriquets".....explication non trouvée.
ou:
Les "Pénachoux" probablement : les paniers à choux.
L'abbé Paul PARIS-JALLOBERT y fut prêtre. mais je ne crois pas qu'il nous ait laissé une explication.

LANVALLAY (Lanvala)

Les "Cotissois". Cela viendrait de "coti" (verbe : cotir = casser) que nous avons déjà vu pour Saint-Père-Marc-en-Poulet. On peut être coti de différente façon, semble-t-il:
Coti (cassé) parce qu'on a trop travaillé. On peut cotir une fleur, la« cotias », sorte de cloche que l'on fait éclater.
On peut être coti... parce qu'on a trop bu et qu'on est ivre-mort... c'est la réputation que l'on faisait aux habitants de Lanvala. Au Québec on dit encore de quelqu'un qu'il est "cassé", avec le sens de fourbu.

SAINT-SOLEN

Les "Rouenniaoux», autrement dit les "rochonneux".
Exemple : Il y a peu de "Rouenniaoux" sur les listes de discussion. mais ils font beaucoup de mal.

SAINT-BRIAC

Les "Piss-piss" du nom d'une grosse coque qui pisse en l'air quand on la ramasse.
Cela semble indiquer que les habitants n'avaient pas une réputation de grande propreté.

CUGUEN

Les habitants s'appelaient les Cugennais, nom que l'on s'est empressé de déformer en "Culs-guennés".

COMBOURG

Les "Gros-chevaux".
Selon Charles LECOMTE, ce surnom viendrait de ce que les chemins aboutissant à cette commune étaient mal entretenus. De ce fait les cultivateurs recherchaient surtout des gros chevaux de trait, genre "percherons"

SAINT-HÉLEN

Les "pattes jaounes " : pattes jaunes.
Les bois profonds de la magnifique forêt de Coetquen ne devaient pas aider à la propreté des chaussures !

SAINT-DENOUAL

Les "essuâs". "Essua ": bagarreur, querelleur.

ROZ-SUR-COUESNON ( RÔ)

Les "rouchoux d'os ". Ils rongeaient les os, par esprit d'économie.

TRANS (TRA-HAN)

Les "cheuvres" (chèvres) ...ou les "gourganiers», mangeurs de gourganes (les fèves). C'est encore le même mot de "gourgane" qui est conservé au Québec.

Des gourganes dans du lait ribot. c'est également excellent.

SAINT-JOUAN-DES-GUÉRETS

Les "gorets " c'est à dire les cochons. jeu de mots un peu simpliste !

PLESDER

Les "guerzilloux d'fouyé" c'est à dire les grillons du foyer. On voulait dire par-là que les hommes préféraient rester au coin du feu... plutôt que d'aller travailler.

TINTÉNIAC

Les " culs plats ". Il s'agit d'un surnom que l'on donnait en général aux cordonniers. Y-en avait'il beaucoup à Tinténiac ? Tinténiac est plutôt connue... pour son église construite au début du XX ème s.. et dont l'architecture est proche du délire (mélanges de styles, gigantisme...)

SAINT-SERVAN

Les "Capucins". et je suppose: les "Capucines ".
*JPT*  Mais aussi les "tchuls pointus" 

PARAMÉ

Les "Mulets".

Est-ce du fait des mulets qui tiraient les petites charrettes des gens de Paramé ?
Est-ce l'entêtement des Paraméens ? Est-ce du au poisson (pas très bon... à force de fréquenter les sorties d'égouts). mais là... je sens arriver une recette qui va me prouver le contraire !) .

MÉZIÈRE-SUR-COUESNON

Les " Pians", c'est à dire les coquins, les rusés. Il fallait être "pian" pour tirer parti des tendances bretonnes et normandes.

TRÉVERIEN

Les "Pirottes" et les "Pirottous ". Les "Patous" de la commune conduisaient leurs troupeaux d'oies en criant :<<pirotte,

SAINS (apport de Michel PELÉ) 

Au début de ce siècle les habitants de Sains vont hériter du surnom de  «mouchoux ».
On raconte que des gens du village du Val aux Bretons, en Pleine-Fougères, volèrent à Sains plusieurs ruches d'abeilles (ou mouches à miel) pendant une nuit. Le lendemain matin, à leur réveil, les habitants de Sains ne furent pas peu surpris de voir les clochetons de leur église couronnés de bonnelles (ruches) vides. Les voleurs furent découverts, mais les volés devinrent la risée
de leurs voisins qui les dotèrent du sobriquet de mouchoux.
Suite à cette affaire les gens de Sains appelèrent ceux de Pleine-Fougères " les pouces mielloux ", par allusion au vol de mouches à miel.

PLÉDÉLIAC

...pourquoi ? ...c'est bien loin ! Parce que cette paroisse (sur laquelle se trouve La Hunaudaye ), semble être le berceau des JUHEL :
Les " Mangeoux d'saocisses ".

Il est vrai qu'en ce moment j'aimerais bien pouvoir dire :
<<Vien don béser un' bolée de sitr o nous ......Ça fait un' boutée que j'en a pâ bu... on pourrait envaler tchetch' saocisses et d'la galette....!>>


Marcel JUHEL

(*) Vous pouvez retrouver de nombreux sobriquets cancalais dans un article du n° 2 des "Cahiers de la vie à Cancale"